Les clés de l’écriture #4 - Dites-en toujours moins que nécessaire
9 octobre 2016
— CLÉ # 4 —
Dites-en toujours moins que nécessaire
Quand vous cherchez à impressionner le lecteur avec vos écrits, plus vous en dites, plus l’histoire parait banale, et moins vous maitrisez l’attention et la tension. Si vous écrivez quelque chose de banal, ce sera original si vous restez énigmatique, et que vous anticipez la réaction du lecteur. Les grands auteurs captivent et envoûtent en écrivant peu. Plus vous écrivez, plus vous avez de chances d’écrire quelque chose d’incohérent ou d’inutile.
L’écriture est en bien des manières un jeu d’apparences, et moins un auteur s’étend se perd dans la narration, plus son récit sera puissant. Votre concision intriguera vos lecteurs. Les êtres humains sont des machines à interpréter et à expliquer ; tout le monde a besoin de connaître l’esprit d’autrui. Si vous révélez toutes les spécificités de votre univers ou de vos personnages au compte-gouttes, nul ne pourra percer à jour les ressorts du récit.
Des révélations laconiques ou inexistantes les troubleront, surtout si elles nourrissent de nouvelles interrogations. Les lecteurs se hâteront de combler ces absences en supposant à tort et à travers, et seront moins en mesure de deviner la progression de l’histoire à force d’établir de multiples théories ou d’espérer un développement particulier. La découverte de ce genre de passage permet à la fois de contenter le lecteur en délivrant quelques éléments sur un mystère du récit et suscitera également chez lui un sentiment de frustration ou de curiosité, ce qui ne fera qu’augmenter l’envie de poursuivre la lecture.
Toutefois, il se révèle rare d’obtenir l’effet escompté simplement en réduisant la taille du texte et limitant les échanges entre les personnages avec des dialogues vagues et courts. Le procédé peut se retourner contre l’auteur et engendrer des personnages sans saveur et des récits trop obscurs. Les personnages peuvent se retourner contre vous, incarner vos écrits à contresens, n’en faire qu’à leur tête sans créer de véritable engouement pour leurs aventures. L’astuce consiste essentiellement à couper lors d’une réécriture l’évident, l’inutile et le personnel du moment que ça ne fait pas avancer le récit ni la psychologie du protagoniste.
Ce procédé peut se révéler fécond. Tout texte devient ainsi l’occasion à véritables exercices d’interprétation d’oracle. Il est préférable de montrer des fragments et de verser dans l’implicite de sorte que le lecteur se creuse la tête pour essayer de comprendre de quoi il en retourne et si sa propre imagination interprète correctement les détails. Chaque élément doit être mince, mais laisser supposer autre chose de bien plus grande envergure. C’est largement plus adroit que de produire des explications et des descriptions interminables qui ne présentent rien de pertinent, pire, qui ne revêtent aucune utilité pour la progression du récit.
Laissez le lecteur réfléchir à votre place en cherchant des indices au lieu de l’inonder d’information. Moins un auteur en dit sur son univers, plus le lecteur voudra en savoir davantage. Plus ils voudront tout connaître, plus vos récits deviendront passionnants à leurs yeux.
En appliquant cette tactique, vous chargerez vos rares écrits de sens et de pouvoir. En outre, moins vous en direz, moins vous courez le risque de laisser échapper des idées incohérentes, voire caricaturales.
Songez à l’oracle de Delphes. Quand les visiteurs consultaient l’oracle, la pythie marmonnait quelques mots sibyllins qui semblaient importants et pleins de sens. Les prêtres s’empressaient de tisser de savantes interprétations, et le voyageur en quête de réponse repartait, impressionné, devant méditer sur quelques mots à la profondeur vertigineuse. Nul ne mettait les paroles de l’oracle et les prêtres délivraient des messages mystérieux : d’authentiques promesses de réponses à des secrets existentiels.
Retenez le conseil : une fois les mots délivraient de votre plume, il est trop tard. Maîtrisez-les à temps, surtout les passages de caractérisation et d’exposition : la satisfaction momentanée d’avoir détaillé l’âme d’un être de papier et d’avoir ciselé un univers vaste peut en réalité coûter très cher au suspens du récit.
- Clé # 1 – Ne troublez jamais le lecteur.
- Clé # 2 – Ne vous contenter pas du protagoniste, utilisez l’antagoniste.
- Clé # 3 – Dissimulez vos intentions.
- Clé # 4 – Dites-en toujours moins que nécessaire.
- Clé # 5 – Respectez la cohérence, développez le cohérence.
- Clé # 6 – Captez l’attention à tout prix.
- Clé # 7 – Faites fonctionner l’imagination du lecteur.
- Clé # 8 – Développez l’intrigue dans un cadre.
- Clé # 9 – Le protagoniste triomphe par ses actes, non par son verbe.
- Clé # 10 – Ciblez le malheur et soignez les interactions.
- Clé # 11 – Rendez les autres personnages indispensables.
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Un peu plus d’une décennie après la sortie du premier Avatar, James Cameron propose la suite directe : Avatar, la voie de l’eau . Ce film éveille un intérêt particulier non pas en raison du succès commercial du premier opus, mais au regard du talent du réalisateur pour les suites. En effet, Terminator 2 et Aliens font autorité comme étant d’excellentes suites, parfois considérées comme meilleures que le film d’origine, chacune ayant apporté un angle différent et explorant de nouveaux aspects de l’univers. Autrement dit, je suis allé voir le second film Avatar plus par curiosité scénaristique que par intérêt pour le monde d’Avatar et son histoire qui, sans être mauvais, n’a rien de fabuleux exception faite de la technique. Le présent article divulgue tout ou partie de l’intrigue.

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Et si Jafar avait de bonnes intentions et que les apparences jouaient contre lui ? Après tout, nous ne savons pas grand-chose le concernant. Dans le film d’animation de Disney sorti en 1992, il n’est jamais fait mention de sa vie passée, de ses origines ni de la nature et l’étendue de ses fonctions. L’unique chose que le spectateur sait est qu’il souhaite devenir sultan à la place du sultan. Si la quête du pouvoir est rarement perçue comme vertueuse, nous ignorons pourquoi Jafar souhaite s’en emparer et ce qu’il compte en faire. En y regardant de plus près, il est tout à fait possible d’imaginer que derrière les complots, la répartie lapidaire et une apparence sinistre se cache un être dévoué qui se soucie réellement de son prochain. Aussi, mettons un instant de côté l e rêve bleu , renversons les perspectives et hasardons-nous à accorder une seconde chance au grand vizir d’Agrabah.

Un long voyage de Claire Duvivier, publié Aux Forges de Vulcain est déjà sorti il y a un moment et il a connu un joli succès dans le petit monde de la littérature de l’imaginaire au regard des nombreux articles le concernant. Toutefois, certains aspects n’ont pas été évoqués, du moins à mon sens certains qui ont capté mon attention et qui soulèvent quelques questions. Aussi, je me suis fendu à mon tour d’un billet. La différence étant que je vais détailler l’entièreté de l’ouvrage et évoquer des éléments de l’intrigue. Cette critique s’adresse ainsi davantage à ceux qui l’ont lu qu’à ceux qui prévoient de le lire.