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L’échelle de Kardashev

27 février 2016

Notre société a atteint un tournant majeur. Selon le célèbre physicien Michio Kaku, le prochain siècle de la science déterminera si nous périrons ou prospérerons. Allons-nous rester une civilisation de type 0, ou allons-nous évoluer et nous diriger vers les étoiles ?




Les théoriciens affirment que, tant qu’une civilisation grandit et devient plus avancée, ses besoins en énergie augmenteront rapidement en raison de sa croissance démographique et les besoins énergétiques de ses différentes machines. En se basant sur ce postulat, l’échelle Kardashev a été développée comme un moyen de mesurer l’état d’avancement technologique d’une civilisation selon la quantité d’énergie utilisable à disposition.



L’échelle a été initialement conçue en 1964 par l’astrophysicien russe, Nikolai Kardashev (lequel cherchait des signes de vie extraterrestre dans les signaux cosmiques). Il imagina trois catégories de base, chacune avec un niveau d’utilisation de l’énergie : type I (10¹⁶W), type II (10²⁶W) et de type III (10³⁶W). D’autres astronomes ont par la suite étendu l’échelle avec le type IV (10⁴⁶W) et V (l’énergie disponible pour ce genre de civilisation serait égale à celle de toute l’énergie disponible non seulement de notre univers, mais dans tous les univers). Ces ajouts prennent en compte à la fois l’accès à l’énergie ainsi que la quantité de connaissances à des civilisations.


Tout d’abord, il est important de noter que la race humaine ne figure dans aucune catégorie. Nous soutenons toujours nos besoins énergétiques à partir de plantes et d’animaux morts, ici sur Terre, si bien que nous demeurons une civilisation de type 0 (et nous avons un très long chemin à parcourir avant d’accéder au rang de type I). Kaku a tendance à croire que, toutes choses prises en considération, nous atteindrons le type I d’ici un à deux siècles. Cependant, il convient de s’interroger sur la réalité que recouvre cette classification.



Le type I désigne une espèce en mesure d’exploiter toute l’énergie disponible de l’étoile de son propre système stellaire, la collectant et la stockant pour répondre aux besoins énergétiques d’une population croissante. Cela signifie que nous aurions besoin de stimuler notre production énergétique actuelle plus de 100 000 fois pour atteindre ce statut. Cependant, être capable d’exploiter toute l’énergie de la Terre signifierait également que nous pourrions avoir le contrôle de toutes les forces naturelles. Dans cette optique, les êtres humains devraient contrôler les volcans, le climat, et même les tremblements de terre ! (Du moins en théorie) Ces types d’exploits semblent difficiles à croire, mais s’avèrent mineurs au regard des progrès nécessaires pour accéder au type supérieur. Il s’agit en fait d’un niveau de contrôle primitif de l’énergie de notre propre planète, et qui n’a absolument rien à voir avec les capacités des sociétés des rangs plus élevés.



La prochaine étape — celle d’une civilisation de type II — implique la capacité de maîtriser la puissance de l’ensemble d’une étoile, à savoir le fait de contrôler l’astre en soi en plus de transformer sa lumière en énergie. Plusieurs méthodes ont été formulées pour mener à bien cette entreprise. La plus populaire reste l’hypothétique « Sphère de Dyson ». Cette solution, s’il est possible de la qualifier ainsi, suppose la construction d’une machine suffisamment grande pour englober toute l’étoile et collecter la plupart (sinon la totalité) de sa production d’énergie et de la transférer à une planète pour une utilisation ultérieure. Il s’agit de l’option la plus spectaculaire, car le niveau d’énergie nécessaire peut être atteint par la construction d’un immense réacteur, à condition de maîtriser la technologie de la fusion nucléaire. Il serait d’ailleurs plus commode de construire pareil équipement à proximité de nuages de gaz géants afin de siphonner progressivement tout l’hydrogène


Que signifie pour une espèce la maîtrise d’autant d’énergie ? En premier lieu, cela permettrait d’assurer sa pérennité, en conférant un pouvoir tel qu’aucune menace connue de la science ne pourrait l’attendre. Explorons, par exemple, l’éventualité où les humains aient vécu assez longtemps pour atteindre ce statut. Un objet de la taille de la lune entrerait de notre système solaire sur une trajectoire de collision avec notre petite planète bleue ; nous aurions la capacité de désintégrer cette menace. Ou, si nous avions le temps, nous pourrions déplacer toute notre planète de la route afin d’esquiver la menace stellaire et si le déplacement de notre planète semble une idée incongrue, voire dangereuse, nous aurions la capacité d’avancer un petit peu Jupiter sur son orbite, ou toute autre planète de notre choix, afin de s’en servir comme bouclier. Il faut avouer que l’idée de jouer un billard cosmique est assez grisante.



Ainsi, du contrôle de toute une planète, d’une étoile, de la certitude d’échapper à l’extinction, passons à présent à l’échelle supérieure : le type III, où une espèce détient la capacité de de la spatiopérégrination intragalactique. Une telle espèce pourrait se déplacer n’importe où dans la galaxie et posséderait toute la connaissance possible afin d’exploiter ou produire toute l’énergie dont elle aurait besoin. En termes humains, des centaines de milliers d’années d’évolution — à la fois biologiques et mécaniques — seraient nécessaires avant d’aboutir à une civilisation de type III. Elle serait si incroyablement différente de l’espèce humaine, que nous n’avons probablement même pas la capacité d’imaginer quelle forme elle prendrait. Cela pourrait être des cyborgs (ou des organismes cybernétiques, des êtres à la fois biologiques et robotiques) ou des mutants, qui à force d’hybridation de manipulation génétique, aurait transformé leur propre espèce pour s’affranchir de ses défauts et s’attribuer de nouvelles qualités.



À ce stade, une telle espèce aurait développé des colonies de robots capables d’autoréplication. Affranchi de problèmes énergétiques, leur nombre pourrait grossir de plusieurs millions d’unités très facilement, et conquérir étoile après étoile très rapidement. Ils pourraient construire plusieurs sphères de Dyson pour encapsuler les étoiles, créant un réseau énorme qui transporterait l’énergie à la planète d’origine. Cependant, s’étendre d’une telle manière sur la galaxie engendrerait certains problèmes, dont celui d’être tout simplement limité par les lois de physique. En particulier, la vitesse de la lumière. Autrement dit, à moins de développer un moteur à distorsion, ou de se servir de trous de vers pour voyager à travers l’univers (deux choses encore du domaine de la théorie), une telle espèce ne pourrait pas aller bien loin malgré toute sa puissance.



Kardashev croyait qu’une civilisation de type IV serait « trop » avancée et que le type III était infranchissable. Il pensait que ce serait le point le plus avancé que toute civilisation pourrait atteindre. Beaucoup le pensent, mais quelques-uns suggèrent l’existence d’autres niveaux. Toute civilisation de type IV serait presque en mesure d’exploiter le contenu énergétique la totalité de l’univers, induisant la capacité de voyager dans le temps (de telles entités pourraient vivre à l’intérieur de trous noirs supermassifs). En se basant sur les méthodes conventionnelles de production d’énergie, ce genre d’exploit est impossible. Une civilisation de type IV aurait besoin de puiser dans des sources d’énergie inconnues en utilisant ou en s’affranchissant de certaines lois de la physique grâce à des procédés pour l’heure inconnus.

Aussi improbable, aussi inintelligibles que ça puisse être, l’échelle comprend bien un V. Concrètement, il serait difficile de parler en terme de civilisation. À ce stade, toute entité vivante et dotée d’une intelligence supérieure aurait peu ou prou la même puissance qu’un dieu puisqu’il aurait les connaissances et la puissance de manipuler l’univers à sa guise.

Les humains semblent donc bien loin de gravir quelques échelons de l’échelle de Kardashev. Toutefois, citons le philosophe Sénèque : "ce n’est pas parce que c’est difficile que nous ne le faisons pas, c’est parce que nous ne faisons pas que c’est difficile".

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